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Analog Collector - le blog
26 juin 2012

Ne ratez aucune miette de l’incroyable énergie de ce disque

THE RONNELL BRIGHT TRIO – POLYDOR 46 106

Ronnell Bright est un pianiste talentueux dont on parle peu hélas. Il est surtout connu pour avoir accompagné la chanteuse Sarah Vaughan à la fin des années 1950. Il fut un brillant accompagnateur mais un musicien de l’ombre. Il n’a enregistré en effet que quatre disques sous son nom. Revenons sur sa carrière à l’occasion de la réédition de l’un de ces disques paru chez Polydor en 1958 et réédité tout récemment par le jeune label Sam Records.

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Ronnell Bright naît en 1930 à Chicago dans une famille d’artistes – sa sœur danse avec les Mills Brothers, une autre chante avec l’orchestre de Fletcher Henderson... Il entame très jeune des études musicales classiques et rêve de devenir concertiste. En 1939, il est lauréat d’une compétition pianistique pour jeunes interprètes et obtient une bourse qui lui permet d’intégrer la célèbre Julliard School of Music. Il ne commence à jouer du jazz qu’au cours de son service militaire dans la marine. Il parfait sa formation musicale à l’école de musique de la marine, très intéressée par ses connaissances et compétences classiques. Démobilisé, il joue avec Johnny Griffin avant de faire partie, de 1954 à 1955, du groupe du bassiste Johnny Pate qui accompagne, entre autres, la chanteuse Carmen McRae. Il rencontre dans la foulée les pianistes Oscar Peterson et Horace Silver et surtout Billy Taylor qui l’encourage fortement à tenter sa chance à New York. Il y enregistre deux disques : l’un avec le guitariste Kenny Burrell et le clarinettiste Rolf Kuhn en 1956 puis un second avec le batteur Bill Clark et le contrebassiste Joe Benjamin en 1957. Son heure de gloire arrive en 1958 lorsqu’il remplace au pied levé le pianiste de la chanteuse Sarah Vaughan, Jimmy Jones.

Au fil des ans, Ronnell Bright accompagne de nombreuses célébrités : les chanteuses Nancy Wilson, Doris Day, Lena Horne… Ses facilités d’arrangeur le conduisent par ailleurs à collaborer notamment avec le chanteur Johnny Mercer, le trompettiste Paul Francis Webster, le compositeur et parolier Sammy Cahn. Horace Silver, les saxophonistes Stanley Turrentine et Dexter Gordon et le chanteur Johnny Hartman n’hésitent pas à reprendre ses chansons et ses thèmes.

Dans les années 1970, il tente une carrière d’acteur au cinéma et à la télévision. Sans grand succès. Parallèlement à ses activités d’arrangeur et de compositeur qu’il poursuit jusque dans les années 1980, il enseigne la musique dans les lycées aux États-Unis.

Un « phrasé très swinguant sans percuter » François Postif, écrivain et critique de jazz

Ronnell Bright n’est pas une légende du jazz, mais un très grand interprète et musicien capable de tout jouer, de s’adapter à n’importe quelle voix, d’alimenter tous les styles, ou presque, du jazz en arrangements de haute volée artistique. Son toucher tonique, précis, son opulente invention harmonique font le bonheur des amateurs de jazz.

C’est à l’occasion d’une tournée en Europe en juin 1958 avec Sarah Vaughan qu’il enregistre un remarquable opus, intitulé tout simplement The Ronnell Bright Trio, pour le label Polydor ravi de lancer un jeune pianiste brillant, « aux idées claires et solides » (F. Postif). Il réunit autour de lui le contrebassiste américain Richard Davis et le batteur anglais Art Morgan, deux soutiens de taille dans la réussite de cet enregistrement qui, curieusement, ne permettra pas à Ronnell Bright de percer comme il l’aurait souhaité.

Au programme, deux blues de Nat King Cole et de Duke Ellington, quatre compositions de Bright, un morceau du contrebassiste Johnny Pate avec lequel le pianiste a déjà travaillé et un thème de l’incontournable Dizzy Gillespie. Le résultat swingue sur les chapeaux de roues et se révèle d’une merveilleuse efficacité mélodique. On sent une immense ferveur musicale au sein de ce trio soudé, visiblement très heureux de jouer et de faire partager son amour du jazz. La capacité unique de Ronnell Bright à donner à chaque note son juste poids et à conférer à chaque combinaison de notes une nécessité triomphante est un enchantement sonore.

On touche ici la grâce absolue : on ne veut rater aucune miette de l’incroyable énergie de ce disque qui n’aura malheureusement aucune suite.

                                                                                                                  Philippe Demeure
                                                                                                                  Pour Analog Collector

 

Technique : 08/10 – Très bonne prise de son mono avec du relief et une belle définition. Bonne dynamique.

NB : je remercie l’éditeur pour ses informations précieuses sur cet enregistrement

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